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Las dos caras de las moneda de Diamela Eltit : le rapport entre la littérature et le contexte politico-culturel


Par Cecilia Katunaric

octobre 2005 (Montpellier, France)

L'essai, Las dos caras de la moneda, est le premier dans le recueil de textes critiques Emergencias de Diamela Eltit.

D'abord, j'ai choisi ce texte parce qu'il me semble un bon exemple de rapport entre la littérature et un contexte politico-culturel déterminé. Ce texte raconte le "re-sentiment" du 11 septembre 1973 dont souffre l'auteur. Elle y analyse les implications politico-culturelles et les conséquences des faits arrivés ce jour-là.

Ensuite, il est intéressant car il montre les caractéristiques, les plus typiques de l'œuvre d'Eltit. Ces caractéristiques dépassent le niveau de la diction(1) littéraire pour s'insérer dans le niveau de la fiction littéraire. On trouve, donc, les sujets constants d'Eltit : le corps-politique, le corps-écriture, la ville en état de siège, la marginalité de la différence, le chaos, la schizophrénie de l'autoritarisme, etc.

Enfin, cet essai est aussi attirant par son titre ambiguë : Las dos caras de la moneda. C'est un jeu de mots qui donne des expectatives et des interrogations au lecteur : S'agit-il de deux histoires parallèles? S'agit-il d'une histoire cachée ou non officielle? S'agit-il de la Moneda, la maison du gouvernement chilien qui fut bombardée? S'agit-il de la monnaie par rapport à l'économie? De même, ce titre ouvre la réflexion d'Emergencias un autre titre intrigant car le mot " emergencia ", en espagnol, possède deux signifiés : l'urgence et l'émergence. Peut-être ce titre fait-il référence à ce qui est écrit, des textes critiques qui ont émergé à partir de l'urgence de dire, de raconter, de re-sentir l'histoire du Chili.

Je voudrais approfondir quelques points importants de cet essai, pour cela je suivrai l'ordre des idées du texte.

Introduction de l'essai

Diamela Eltit commence cet essai en se demandant :

Me pregunto: cual sería la manera posible de referirse a la historia política chilena, cuando esa historia es a la vez personal, corporal, sin caer en el absorto vértigo de la literatura testimonial o en el previsible ejercicio de construir una mirada " inteligente " o distante sobre los acontecimientos que radican caóticamente - sin principio ni fin - en la memoria y cuyas huellas perviven en una a-temporalidad transversal que, a menudo, asalta perceptiblemente en el presente… (2)

Dans cette demande introductive, il y a trois éléments fondamentaux que l'on doit souligner pour comprendre la nature du texte: l'historie en tant qu'expérience personnelle ; la peur de convertir cette analyse historique en un témoignage ou en une analyse arbitraire ; et finalement, le sujet de la mémoire.

Premièrement, l'auteur nous fait comprendre, tout de suite, que nous sommes face au fait historique qui devint personnel. Il s'agit d'un moment qui marqua le corps de l'auteur. C'est ainsi qu'on rentre dans l'un des sujets typiques d'Eltit : le corps. À ce propos Léonidas Morales T. dit dans l'introduction d'Emergencias :

En el objeto de su reflexión (el de Eltit), no importa cual sea la esfera de prácticas específicas de la inserción de ese objeto, el discurso crítico privilegia, por una parte, el espacio del cuerpo como un elemento estratégico de su configuración conceptual. Un espacio desde luego cultural, siempre poblado de signos que hablan del "poder " o lo delatan, en la conceptualización de Foucault(3), y de su insistencia secular en colonizar al cuerpo, inscribiendo en él, soterradamente, sus códigos.(4)

Ainsi, Eltit privilégie cette réflexion comme un élément qui est inséré dans son corps, et c'est à partir de cette configuration conceptuelle de l'histoire du Chili qu'elle construira son discours. Ce discours corporel est aussi chargé des " signes " qui font référence aux relations de pouvoir, relations culturelles qui ,à mon avis, furent aussi modifiées par l'expérience corporelle et qui en conséquence modifient le discours actuel de l'auteur.

Deuxièmement, Eltit ne veut pas tomber dans un récit de littérature confessionnelle, c'est-à-dire dans une littérature chargée d'un sentimentalisme qui convoque la sensibilisation du lecteur à travers la mise au premier plan de l'atrocité absolue. Le but de l'auteur est de faire une réflexion critique qui ne tombe pas non plus dans un exercice prétentieux et/ou avec un regard partiel sur les faits.

Troisièmement, on trouve le sujet de la mémoire chaotique. Une mémoire blessée constituée par des événements d'injustices, des morts et de la douleur. Cette mémoire accidentée n'a pas vécu le processus de deuil et en conséquence, elle n'a pas pu se reconstruire. On constate que le processus de deuil, dans une partie de la population chilienne, est un processus non accompli, une expérience inachevée, car aboutir à un travail de deuil suppose l'élaboration d'un récit sur le passé qui possède un début et une fin. Nous sommes en face d'une réflexion qui lie l'expérience et la narration. Nous sommes face à un exercice de reconstruction de mémoire qui essaye d'actualiser consciemment le passé pour l'assumer, même si ce présent est pris d'assaut par les traces d'une mémoire encore atemporelle et transversale.

Le mot "coup"

L'auteur situe aussi le lieu d'où elle produira son discours critique. Ce lieu sera la littérature. C'est à partir de la littérature et des significations du mot "coup"(5) qu'elle approchera l'histoire politique chilienne et plus spécifiquement le 11 septembre 1973.

Diamela Eltit affirme que le mot " coup " possède de multiples significations, et des résonances personnelles pour chacun :

Digo golpe pensando por ejemplo, en cicatriz o hematoma o en fractura o en mutilación. Digo golpe corte entre un instante y otro, como sorpresa, como accidente, como asalto, como dolor, como juego agresivo, como síntoma. El golpe territorio privilegiado y repetido de la infancia, cuya frecuencia ocurre bajo la forma de la caída o del ataque, es quizás la primera memoria, la práctica en la que se internaliza de manera carnal esa palabra cuando el cuerpo estalla materialmente como cuerpo o aparece en su diferencia con lo otro -el otro- ese precoz contrincante que se diagrama como cuerpo enemigo desde el golpe mismo. (6)

La première acception du mot se réfère à la blessure. La deuxième acception se réfère à quelque chose d'inattendu qui fait irruption de manière violente dans le présent et qui par conséquent génère de la douleur. Et finalement, la troisième acception fait allusion à l'expérience de la chute réitérée, à la tentative en vain, à l'échec. Le sentiment qui génère cette dernière acception du mot " coup " est pour l'auteur, la première mémoire : une mémoire qui s'incarne dans la peau, une mémoire corporelle qui apparaît au moment où le corps éclate en tant que totalité pour donner lieu à la différence. Telle différence est en rapport à "autre" corps, un autre distinct de soi-même. Elle parle de l'autre corps en tant que corps ennemi qui apparaît dans la différence.

Cependant le mot "coup" s'étend aussi au mot "État" pour recréer une autre acception : la façon politique de solder une différence d'options. Eltit lie cette action violente à la première mémoire, à l'ennemie d'enfance. Par conséquent, l'auteur infantilise la violence en tant que stratégie politique, en affirmant que le système autoritaire fut conduit par des "enfants tyranniques" qui prétendirent atteindre un ordre absolu et fou à l'intérieur de la civilité. Ce "coup" dans la civilité produisit une séparation profonde dans la citoyenneté, entre ceux qui soutirent le projet militaire et ceux qui refusèrent l'imposition de l'autoritarisme. Ce binarisme des oppositions, sur lequel se construit la théorie de l'autoritarisme, est le produit des différences entre purs et impurs, patriotiques et extrémistes. L'autoritarisme donna lieu au nouveau régime des corps: "el cuerpo, como foco político, se convirtió en un trágico territorio modélico de disciplinamiento. Modelo que se hizo primordial a través de la tortura, el crimen y la desaparición." (7) Un fois de plus, on aperçoit le "corps " en tant qu'élément stratégique de la configuration du mot "coup".

Le 11 septembre 1973

Diamela Eltit décrit le 11 septembre comme déploiement scénographique hollywoodien marqué par des signes de pouvoir qui se développeraient au long de dix-sept années. Les personnages principaux furent les militaires qui notifiaient des ordres, au nom de la patrie :

Ese día, los uniformes de los soldados sobresaturados con distintivos, con sus rostros tiznados, las armas en posición de ataque, fueron las figuras decisivas para señalar una atmósfera de guerra […] montados en tanques y camiones con poses en las que ya era imposible distinguir la posible impostación (cinematográfica), de un real deseo de eliminar a cuanto "enemigo " se cruzara por el camino. (8)

Le personnage secondaire était Allende qui faisait son dernier discours public depuis La Moneda. Un leader qui envisageait un coup d'État et l'imminent bombardement de La Moneda (9). On prétendait le déloger et avec lui un morceau d'histoire démocratique. À ce moment-là, Allende était conscient de ce qui arriverait, comme l'était aussi l'auteur : "podían inferirse los signos depresivos de un líder enfrentado a la situación de un golpe de estado que ha esa hora, él ya sabía y nosotros sabíamos -atendiendo a los matices decaídos de su tono- se había vuelto irreversible ".


La nouvelle esthétique de la ville

À partir ce jour-là, la manière d'appréhender la ville change. Santiago devint un état de siège avec une esthétique de guerre qu'Eltit rependra habituellement dans ces narrations. L'auteur commence à décrire les éléments de guerre qui envahirent Santiago. Au début, ces éléments de guerre étaient des éléments illogiques et irréels, des éléments filmiques. Ils devinrent réels au moment où ils dépassèrent la fiction supposée pour devenir corporels à travers l'expérience de la peur :

Un número indeterminado de aviones establecía un vuelo rasante sobre la ciudad, el enloquecedor sonido de vuelo rasante de esos aviones que parecía que de un momento a otro se iban a venir cuesta abajo para despeñarse sobre el techo de una casa (de mi casa, de la casa del vecino -como explicarlo- de todas las casas). (10)

On constate dans le paragraphe antérieur que la parenthèse marque l'appropriation des faits en tant qu'expérience personnelle et corporelle. La description continue : "y también los disparos. Ráfagas intermitentes de metralletas que empezaban a instalarse como un sonido posible en la ciudad."(10) De nouveaux sons qui n'existaient pas apparurent comme des réalités possibles. Ces sons ne seraient que les indices des nouveaux signes du pouvoir qui occuperaient la ville : les signes de l'ennemi :

[…] por los sonidos de las ametralladoras, por el aviso de bombardeo, por las caras tiznadas, ese enemigo iniciaba su inserción en un pedazo del cerebro de cada uno de aquellos que estábamos horrorizados por lo que estaba sucediendo y en medio del horror y de la pena, ya nos habíamos convertido simbólicamente en ese enemigo extremista que buscaban […] (11)

C'est ainsi que les signes de l'autoritarisme commencent à se manifester petit à petit à travers de nouvelles marques dans la ville : les marques du fascisme, les marques d'une organisation imposée, les marques d'une entreprise messianique et militaire.

L'état de siège dans la ville créa de nouvelles règles qui redirigèrent toute circulation, toute volonté et toute liberté. Santiago était dépeuplée de toute personne civile et la ville perdait son caractère public pour laisser place aux interdictions. De plus, la ville divisa non seulement la population mais aussi la sphère privée de la sphère publique. Ainsi, la civilité fut réduite à l'espace domestique, tandis que les militaires dominaient les rues :

El estado de Sitio abría una nueva escisión que, a lo largo de 17 años, se iba a mantener con distintos rigores, dividiendo, territorializando, los espacios al separar, de manera radical, la habitación de los cuerpos entre lo público y lo privado […] No se podía salir a la calle, pero, lo más importante, no se podía transitar porque el afuera ya no pertenecía, había sido despojado de su carácter comunitario.(13)

La marginalité dans la ville est peut-être la caractéristique la plus importante de la nouvelle esthétique de la ville. C'est pour cette raison qu'Eltit prend la marginalité comme l'un des topiques significatif de son écriture. La marginalité est donc une autre caractéristique extérieure qui se corporalise dans les récits de ses personnages : des corps nomades et marginaux qui se déplacent dans une ville minée, dans un espace "dehors" qui peut être seulement compris à travers l'imaginaire de la sang et de la guerre.

Les médias

Les médias furent les premiers moyens de diffusion du régime autoritaire. Les radios, après avoir été saisies par les militaires qui empêchèrent la transmission du dernier discours d'Allende, commencèrent à diffuser des hymnes militaires, tandis que la télévision fut intervenue par une transmission ininterrompue de dessins animés qui bloquait, dans un sens tragicomique, l'information :

[…] los dibujos animados que, bajo el pretexto de distraer a la población infantil, daban cuenta, a la vez, de una didáctica, de una voluntad irónica por infantilizar a la población o bien de la mirada jerarquizadora de los nuevos poderes que emergían, cuya voluntad era mantener la civilidad en un estado de control y dependencias infantiles, supeditados a los avatares de los dibujos animados que, con sus voces distorsionadas, dejaban al final da cada cápsula una moraleja edificante. (14)

Cependant tout d'un coup, les dessins animés furent interrompus par une information concise : le président Allende s'était donné la mort à l'intérieur de La Moneda.

Ainsi, les médias furent les sièges des militaires qui appelaient les leaders politiques de l'Unité Populaire à se livrer et la population à les dénoncer.

Les médias diffusèrent aussi un nouveau lexique national :

[…] invocaban también al patriotismo de la población para denunciar el extremismo, porque el extremismo era la palabra que alcanzaba un extenso sentido general, ese sentido que se estaba inscribiendo, al cabo de las horas, con una fuerza negativa en lo que iba a ser el nuevo léxico nacional. (15)

Ainsi, certains mots obtinrent des connotations négatives, des mots tels qu'extrémiste, extrémisme, communisme, communiste, socialisme, socialiste, camarade, syndicat, travailleur, etc. Ce qu'il faut souligner, c'est que ce nouveau lexique s'instaura de manière définitive au long de ces heures-là. Le nouveau lexique serait donc, l'un des signes de pouvoir qui conquerraient aux (les) corps ou bien, il serait l'une des manifestations de pouvoir de certains corps qui émergèrent pendant la journée du 11 septembre 1973.

Le nouveau personnage

À la fin de l'après-midi les dessins animés furent stoppés par l'hymne national el les visages de la "Junta Militar" qui s'adressait au pays. Entre ces personnages il avait un visage particulier qui ne cesserait d'être effrayant :

Por primera vez, para alguno de nosotros, aparecía públicamente el rostro que no iba a cesar, porque era el general Pinochet quien encabezaba la nueva Junta, amparado tras lentes oscuros, escamoteando la dirección de su mirada, una mirada imposible de detectar detrás de esos lentes que eran otra forma de blindaje, ratificándose la implantación de una atmósfera rígida[…](16)

L'image de Pinochet était aussi une extension de la scénographie de la terreur. C'était l'image d'un dictateur militaire dans tout son sens. Il fut le porte parole et l'exécuteur du nouveau modèle d'État : l'autoritarisme. Un tel modèle fut la caractéristique principale du régime de Pinochet. Il s'agit non seulement d'un nouveau lexique, mais aussi d'une nouvelle rhétorique :

[…] el nuevo lenguaje público, que perseguía una comunicación idéntica a los bandos militares, idéntica por su abismante escasez, por su tono impositivo, por la palabra seca y oclusiva que circulaba por la cara menos que impasible de lo que semejaba a un padre arcaico que, desde la convincente teatralidad de su enojo, parecía decidido a tomar cualquier medida para demostrar la plenitud de su poder patriarcal. (17)

On aperçoit que la figure de Pinochet était une caricature de n'importe quel roman du Réalisme Magique.

En plus, si on fait une lecture de genre, on se rend compte que l'histoire politique eut comme héros (ou anti-héros) une caricature effrayante qui joua le rôle d'un père despotique et macho. Ainsi, la société chilienne, habituée à la domination masculine, l'accepta comme une réalité possible, car : "quand une société assimile de façon naturelle la domination masculine, plus elle accepte les ordres de domination et en conséquence, plus elle accepte le binôme domination/subordination et toutes ses implications et ses dérivations." (18)

En conséquence (dès lors), l'histoire politique du Chili peut être lue comme un mythe masculin. L'histoire d'un héros-tyran qui arriva à conquérir son propre peuple pour le faire sortir d'une "Sodome et Gomorrhe socialiste" et le conduire vers un ordre divin, vers un ordre moral, vers un ordre capitaliste. Mais, comme tout ordre qui a un support binaire, il a une tendance à l'exclusion de la différence et à l'opposition, et un penchant à l'homogénéisation de tout son domaine d'action.

 

Les conséquences

Le soir, la ville commença à faire plus visibles les signes de la nouvelle institution politique qui se manifestait à travers les signes mortifères : "Miles de ciudadanas y ciudadanos habían sido detenidos a lo largo del país y eran conducidos hasta centros militares y estadios deportivos. Un número considerable de hombres fue ejecutado durantes las horas en que transcurría el golpe.(19) "Ce fait vient d'être officialisé au Chili après trente deux ans à travers l' "Informe de la comisión sobre prisión política y torturas"(20), donne les noms, les lieux de détention et de torture, ainsi que les lieux où furent disparus les corps des prisonniers politiques.

L'ignorance de ces faits empêchait le processus de deuil et le travail de devoir de " juste mémoire ". Il est l'un des sujets que traite Eltit dans ses romans de micro-fiction et de fiction post-dictatoriale, dont les personnages se caractérisent par leur capacité à décoder les signes urbains et par leur condition de survivants. Mais, derrière les signes du pouvoir autoritaire qui soumettaient les personnes, il y avait une cause cachée, une justification économique :

[…] lo que estaba detrás del avasallamiento a los cuerpos, aquello no dicho, radicaba en un deseo económico, en una forma salvaje de rehacer el capital. Se trataba de recuperar la concentración de los bienes a costa de la exacerbación del cuerpo-especialmente de los cuerpos populares- empujados al límite de la carencia, abusados en impresionantes sesiones de tortura, en inacabables humillaciones mentales[…] El escenario del 11 de Septiembre fue, especialmente, una escenografía ornamentada, tiznada, travestida de valores patrióticos que, en realidad sólo buscaba la implantación de un capitalismo radical, camuflado detrás de discursos esteriotipados que nombraban sin cesar la patria, el orden y la integridad de la familia chilena mientras se extendían, clandestinos, los espacios de la reclusión y el despido masivo de trabajadores no adictos al sistema[…] (21)

Le coup d'État se justifia, à ce moment-là, comme le seul moyen d'extirper le marxisme. Le socialisme démocratique d'Allende fut vu par les militaires, comme un système qui empêchait la véritable liberté de la population et le développement du pays. Ainsi, tout de suite après l'arrivée de la " Junta Militar ", les entreprises privées qui avaient été nationalisées où qui étaient sous la direction des syndicats, furent restituées aux anciens propriétaires, tandis que le territoire chilien fut distribué à ceux qui appuyèrent économiquement le coup d'État.

Malgré la bonne économie actuelle, le Chili est un pays dans lequel les couches sociales sont très hermétiques, ce qui génère une inégalité économique et des opportunités très marquées. En outre, la distribution du territoire chilien reste, comme tout les grands monopoles, entre les mains des entreprises privées. La droite justifie cette action, en affirmant qu'à ce moment-là, il n'y avait aucune loi qui empêchait de telles actions. La distribution de biens fut une action légale. À mon avis, la légalité ne concerne pas nécessairement la légitimité, de même que la légitimité ne concerne pas forcement la légalité. Pour moi, ce fait peut être légal mais pas légitime, car il signifie au fond un vol de tous les chiliens et de tous les araucans.

À ce moment-là, le discours officiel ne dit pas que le but du coup d'État était la restitution des capitaux privés. Le but divulgué fut le progrès, mais le progrès dans un sens abstrait, sans implications et sans explications. Ce progrès fut réalisé au prix de la répression des pauvres, des gens contraires au régime, de la culture, de la démocratie, de la libre expression, etc. Le coup d'État se justifia comme une action héroïque et une salvation messianique.

L'auteur affirme, dans la dernière partie de l'essai, que le seul signe de pouvoir qui fut clair dès le début fut l'équation binaire qui faisait la différence entre " nous " et " ils ". Le pronom personnel " nous " signifiait l'ordre, la famille et le progrès. Le pronom personnel " ils " signifiait l'autre, l'extrémiste et le révolutionnaire. Cette différentiation cachait une autre opération plus complexe :

[…] el desmantelamiento progresivo del Estado de cara a una población civil imposibilitada de realizar cualquier gesto de repudio. Detrás de la represión, más atrás de la grave crisis de derechos humanos, el desmantelamiento del Estado estaba supeditado a la filiación irrestricta a un liberalismo que se iba a convertir en triunfo, verdad y dogma esencialista.(22)

On aperçoit que la notion d'État nation dans son sens politique, une communauté humaine consciente de son identité qui forme son histoire et sa culture, se désintégra petit à petit, parce que l'autoritarisme homogénéise et réduit l'identité de la communauté au modèle militarisé qui nie la possibilité d'opposition, donc la possibilité de construire une culture et de l'enregistrer dans une histoire non médiatisée. La désintégration de l'État démocratique fut liée au libéralisme économique : ce libéralisme constitue l'actuelle justification du 11 septembre 1973.

Finalement, on arrive à la fin de cet essai. Je ne veux pas faire une interprétation du dernier paragraphe parce que je pense qu'il assez clair et qu'il ne mérite pas d'être touché :

Hoy que Chile persiste -jubilosamente- en esa economía que se funda teóricamente en el relativismo para posibilitar así el compra y vende, el compra y vende y el derecho (obligación y deber) a la deuda como forma seudo democratizadora, pues no deja ser significativo recordar que el día 11 de Septiembre se produjo- histórico, histérico- el bombardeo a la moneda. A La Moneda esa. Otra. (23)



 

NOTAS

(1) Définition qui donne Genette au récit factuel comme l'essai et l'autobiographie dans son œuvre Fiction et Diction.

(2) Diamela Eltit, Emergencias, Las dos caras de la moneda, Santiago du Chili, Planeta/Ariel, 2000, p. 17.

(3) Diamela Eltit dans ces textes critiques, fait référence à Foucault et sa théorie du pouvoir, spécialement dans son livre Vigilar y castigar.

(4) D.Eltit, op.cit., p. 12

(5) " Coup " en français.

(6) D.Eltit, op.cit, p. 18.

(7) D. Eltit, op.cit., p. 18.

(8) D. Eltit, op.cit., p. 19.

(9) Le palais présidentiel

(10) D. Eltit, op.cit. p. 19.

(11) D. Eltit, op.cit., p. 19.

(12) D. Eltit, op.cit., p. 20.

(13) D. Eltit, op.cit,, p. 21.

(14) D. Eltit, op.cit., p. 20.

(15) D. Eltit, op.cit.,p. 21.

(16) D. Eltit, op.cit., p. 22.

(17) D. Eltit, op.cit., p. 22.

(18) Idée proposée par le professeur Milagros Ezquerro, Usos y abusos : en torno a la obra dramática de Josefina Plá, au congrès " Estéticas identitarias y literatura " à l'Université du Chili, 2004.

(19) D.Eltit, op.cit., p. 22.

(20) Direction électronique où se trouve cet informe de manière détaillée : http://www.lanacion.cl/prontus_noticias/site/edic/home/port/torturas.html

(21) D. Eltit, op.cit., p. 23.

(22) D. Eltit, op.cit., p. 24.

(23) D. Eltit, op.cit., p. 24.

 
 

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Octobre 2005.
(Montpellier, France)